Dans nos potager comme dans la société, l’eau a une place centrale dans nos vie. Et pourtant, elle vient parfois à manquer. Canicules à répétitions, sécheresses à rallonge, nous devons nous adapter aux aléas climatiques, et plus généralement à la saison estivale. Dans cet article, nous vous proposons toutes nos techniques pour diminuer les besoins en eau de nos légumes.
Sommaire
Sécheresses et canicules à répétitions
Les sécheresses et le changement climatique sont des réalités de plus en plus évidentes, même si toutes les années ne sont pas concernées. Les restrictions d’eau sont devenues courantes dans de nombreuses régions. D’ici 2050, on estime que 84% des terres agricoles mondiales pourraient souffrir de pénuries d’eau. Il est donc impératif de chercher à économiser cette ressource vitale. Dans un potager, les enjeux sont les mêmes à plus petite échelle : nous devons mettre en place un maximum de techniques pour réussir à produire des légumes sains pour nourrir notre famille, sans être 100% dépendant de l’eau du robinet.
On estime que dans les décennies à venir, certaines régions pourraient être victime de fortes irrégularités dans les précipitations estivales. Cela dépend énormément des régions, mais l’augmentation progressive des températures induira forcément une consommation accrue en eau des cultures. Si ce sujet vous intéresse, voici une étude intéressante à lire sur le sujet.
Les semis et la germination
Si on peut faire des économies d’eau et endurcir nos plantes à la sécheresse, les semis eux sont délicats et nécessitent un sol constamment humide. C’est donc dès ce stade qu’il faut se préoccuper de l’eau. Pour économiser de l’eau lors de la germination des semences, quelques gestes simples peuvent faire toute la différence. Voici quelques astuces pour limiter l’arrosage lors de la phase de germination :
– Utilisez des voiles posés SUR le sol pour maintenir l’humidité pendant les premiers jours de germination. Enlevez-les dès que les plantules sortent.
– Optez pour des semis en godets que vous pourrez garder à l’ombre les premiers temps, car ils nécessitent moins d’eau que les semis en pleine terre.
Après la levée des plants en godets, évitez d’arroser directement au sol. Utilisez des soucoupes pour les plants, ce qui permet de conserver l’eau et d’éviter le gaspillage. En plus de cela, l’arrosage par bassinage permet de bien mouiller la motte sans pour autant lessiver le terreau ou le tasser.
Lorsque vous semez en pleine terre, évitez de le faire en plein soleil. Utilisez des planches, du voile P17 ou du carton pour limiter l’évaporation de l’eau et réduire la fréquence d’arrosage. Les planches posées sur le semis peuvent permettre de faire germer des graines avec un seul arrosage, ce qui est particulièrement utile en été.
Un nouveau cycle de l’eau sous les bâches d’ensilage
Les bâches d’ensilage peuvent être utilisées pour retenir l’humidité dans le sol. Bien qu’elles puissent ne pas être esthétiquement plaisantes, ni très naturelles, elles sont très efficaces pour économiser l’eau. Ces bâches ne laissant pas passer l’eau, un cycle se crée sous la bâche avec de l’évaporation, qui vient se fixer sous la bâche sous forme de gouttelettes et retombe au sol. Certaines cultures comme les courges ou les patates douces se plaisent très bien sur bâche et ne nécessitent alors que peu d’arrosage. De plus, vous pouvez assez facilement en récupérer gratuitement auprès des éleveurs : c’est un déchet issu de l’ensilage.
Il s’agit d’une pratique agricole où l’on vient faire fermenter un végétal vert dans une bâche étanche pour nourrir les bêtes par la suite. Dès que les bâches sont trop trouées, elles ne peuvent plus servir à l’ensilage et sont envoyées au recyclage. En les récupérant pour le potager, vous prolongez donc la vie de cette bâche que vous pourrez, une fois trop abîmée, réintégrer dans le processus de recyclage.
Vous pouvez camoufler la bâche avec de la tonte fraîche ou du broyat pour un meilleur esthétique. Si vous n’êtes pas convaincu par les bâches, dites vous qu’elles vous permettent d’économiser beaucoup d’eau et de produire plus. Si, par manque d’arrosage vos cultures produisent peu ou pas, vous devrez alors acheter des légumes du commerce qui ont poussé avec de l’irrigation, et surement aussi des bâches… à méditer donc mais l’utilisation du plastique en permaculture n’est pas à bannir non plus ! D’autant plus qu’ici, il s’agit d’un déchet que l’on va réutiliser avant de le recycler.
Limiter l’évapotranspiration : arroser en profondeur
L’arrosage en profondeur est une stratégie efficace pour permettre aux plantes de s’enraciner plus profondément. Enfoncez une bouteille ou un bambou percé dans le sol près des plantes et arrosez directement à l’intérieur pour que l’eau atteigne les racines en profondeur. Pour les courges ou les patates douces qui sont coureuses, pensez également à planter un bâton au pied de chaque plant. Cela vous permettra d’optimiser vos arrosages en apportant de l’eau directement sur les racines. Attention, cette méthode d’arrosage en profondeur n’est pas très intéressante sur des sols très drainants. Privilégiez là sur des sols argileux ou limoneux.
Autre technique pour arroser en profondeur et limiter l’évapotranspiration : les oyas.
Les oyas, ou ollas, sont des poteries poreuses qui diffusent lentement l’eau dans le sol. Il suffit de venir les enterrer en amont de la culture entre les légumes. Ces derniers viendront par la suite mettre leurs racines autour de l’oyas pour y puiser de l’eau par capillarité. Les oyas sont une solution d’arrosage low-tech très efficace. Vous pouvez les utiliser pour économiser de l’eau tout en nourrissant vos plantes de manière efficace.
Pour concentrer l’eau autour des racines de vos plantes, créez des cuvettes en terre lors de la plantation. Cela permet de retenir l’eau et de l’acheminer directement là où elle est nécessaire.
Sécheresse : récupérez vos eaux domestiques !
À chaque douche, le temps que l’eau chauffe, ce sont plusieurs litres d’eau qui sont perdus systématiquement. Une astuce simple consiste à récupérer l’eau de la douche en plaçant une cuvette à vos pieds. C’est toujours plusieurs litres par jour et si tous les membres de votre foyer le font, vous pouvez récupérer plusieurs dizaines de litres d’eau pour vos semis et arrosages quotidiens. Vous pouvez également utiliser l’eau de rinçage pour arroser vos légumes. Cette pratique peut vous permettre de devenir plus autonome en eau pour votre jardin.
Idem avec les eaux de cuisson non salées…
Installez une mare !
La biodiversité aussi a besoin d’eau pour se rafraichir. Toute cette faune est nécessaire à un bon équilibre dans les écosystèmes que sont nos jardins. Si cette idée vous intéresse, je vous invite à découvrir notre article avec plusieurs retours d’expériences sur « Comment créer ma mare naturelle ? » Vous y trouverez notamment un pas à pas qui illustre toutes les étapes.
Le paillage en parade à la sécheresse
Le paillage est une astuce bien connue en permaculture pour limiter l’évaporation de l’eau du sol. Utilisez des matières organiques comme de la tonte fraîche pour garder l’humidité près des racines de vos plantes. Cette technique est applicable à l’ensemble des plantes du potager et les économies d’eau sont non négligeables. Vous pouvez même venir pailler de nombreux semis qui passeront sans soucis à travers cette couche. Pour des semis veillez à ne pas mettre un paillage trop épais d’un coup mais pour des plantes installées, vous pouvez y aller ! N’hésitez pas à mettre 20 voire 30 cm d’épaisseur de paillage sur toutes vos planches si vous arrivez à avoir la quantité nécessaire en matière organique.
Vous souhaiter produire votre paillage sur votre terrain ? Nous vous avons écris un article avec toutes les façons d’être autonome en paillage
Autre petite astuce qui permet de limiter l’arrosage : paillez vos allées. Dans le cas contraire, l’eau cherchera à s’évaporer par ces zones non paillées. Vous pouvez même choisir de ne pas tondre les allées en été pour économiser de l’eau. Tondre à ras entraîne une repousse rapide et nécessite bien plus d’eau qu’une prairie non tondue ! Mais c’est alors un peu la jungle au potager… À chacun de trouver sa méthode préférée.
En cas de grosses chaleurs, l’ombrage salvateur
Pendant les périodes de chaleur, ombrer votre potager peut protéger vos cultures et votre sol des températures élevées. Cependant, choisissez des cultures adaptées à l’ombre si nécessaire. Il existe de nombreuses façons d’ombrer le potager : voiles, canisses, draps, arbres… on détaille toutes ces méthodes dans notre article « Comment ombrer le potager? » L’ombrage est de plus en plus recherché pour de nombreux végétaux lors des épisodes caniculaires. Des courges ou même des tomates se plairont plus à mi ombre qu’en plein cagnard lors de ces périodes très chaudes.
Bloquer le vent dans votre potager peut également réduire l’évaporation de l’eau. Une haie ou des plantes annuelles peuvent protéger vos cultures des vents desséchants. On dit qu’une haie filtre le vent jusqu‘à 7 fois sa hauteur en longueur. Avec une haie de deux mètres de haut, c’est jusqu’à 14 m derrière la haie qui seront abrités.
Des décisions politiques et locales
À l’échelle globale, des décisions politiques sont essentielles pour résoudre ce problème. Il est intéressant de voter pour des politiques environnementales responsables et de soutenir les collectivités qui subventionnent les solutions de récupération d’eau. De plus en plus de mairies et de communes mettent en place des stratégies pour capter un maximum d’eau.
À titre d’exemple, la ville d’Elne dans les Pyrénées-Orientales se démène pour enrayer ce phénomène. Ces dernières années, le déficit de pluie de la commune est important. 150 mm d’eau en 2022 contre 600 mm en moyenne les années précédentes. La mairie s’est emparée d’un concept créé en Chine pour lutter contre les inondations et augmenter le stock d’eau dans les sols : les villes éponges. Le principe : installer des revêtements perméables afin que l’eau ne ravine pas, planter des arbres et débitumer une partie des centres-villes. Un exemple que de nombreuses communes devraient être amenées à suivre. Le média Reporterre est allé à la rencontre des habitants de cette commune dans ce reportage.
À l’échelle de nos jardins, nous pouvons également faire notre part pour économiser de l’eau.
La question de l’eau au jardin vous intéresse ?
Nous avons réalisé un dossier complet dans le n°14 de la revue sur la gestion de l’eau au jardin. Mieux anticiper les canicules, faires chuter la température au sol en cas de grosses chaleurs ou réussir à produire par temps de sécheresse ? Vous y trouverez de nombreux conseils pour réduire au maximum vos besoins en eau et pour optimiser vos apports.
Vous retrouvez également cet article dans nos archives accessibles gratuitement en vous abonnant.
J’espère que cet article vous aura permis d’un peu mieux appréhender les enjeux de la sécheresse et de la canicule dans un potager. En permaculture, de nombreux leviers peuvent vous aider pour limiter les dégâts liés aux chaleurs excessives en été.
Bonjour
L étude citée : On estime que l’on perdra bientôt près de 20 mm de pluie par mois en moyenne en été, mais avec de fortes variabilités selon les années. (voir l’étude)
le pointeur ne fonctionne pas
merci
Effectivement, le technibio n°95 a été supprimé du site de la chambre d’agriculture de la Loire. Nous allons essayer de retrouver l’étude en question. Merci !